DIVISIONS TERRITORIALES EN FRANCE en 1789 par A. BRETTE

SOMMAIRE

CARTE

GÉNÉRALITÉS OU INTENDANCES

Origine du mot généralités. - Les anciens généraux des finances. - Ressort des intendants ou commissaires départis. - La généralité proprement dite quelquefois distincte de ce ressort. - Nombre des généralités en 1789.

Les généralités, entendues au sens de ressort d'un intendant (car nous ne pouvons entrer ici dans la subtile recherche de reconnaître ceux de ces ressorts qui avaient été régulièrement érigés en généralités), offriraient, mieux encore que les gouvernements, matière à d'intéressantes études. Les recherches ne porteraient pas sur les mêmes objets. Les intendants, en effet, n'étaient pas comme les gouverneurs généraux pourvus de charges constituant de véritables propriétés; leurs commissions étaient toujours révocables. Ces recherches seraient, pour les impôts et les finances, particulièrement fructueuses. "Les généralités, lit-on dans l'État de la France, en chacune desquelles il y a un bureau des trésoriers de France, sont établies pour faciliter la recherche des deniers, des tailles, taillons et subsistances... Il n'y avait autrefois qu'un trésorier général des finances, qui était appelé le grand Trésorier et qui avait la direction de tous les revenus du roi. Philippe de Valois en créa un second; Charles V, un troisième, et Charles VI, un quatrième. Henri II les multiplia jusqu'à seize, afin qu'il y en eût autant que François 1er avait établi de receveurs généraux. Leur titre était celui de généraux des finances; leurs charges furent, dans la suite, unies à celles des trésoriers; et, après cette union, ils prirent la qualité de trésoriers de France et leurs départements ont été appelés généralités." Les fonctions des trésoriers de France étaient devenues, à la fin de l'ancien régime, à peu près honorifiques. Les véritables maîtres en matière d'impôts, de finances, police, etc. (maîtres à degré variable suivant la constitution du pays, pays d'élections, pays d'États, pays conquis), sont les intendants. "Dans chaque généralité, lit-on encore dans l'État de la France, il y a un intendant envoyé par le roi pour y prendre connaissance des affaires de justice, finances et autres qui concernent le bien de Sa Majesté et du public dans tous les lieux de son département...; les commissaires du roi ou intendants ont commencé à être départis dans les provinces l'an 1635... De plus, il y a, dans chaque généralité, deux receveurs généraux des finances qui font alternativement l'exercice d'une année, pour recevoir, des mains du receveur des tailles, les deniers royaux qui lui ont été remis par les collecteurs, et pour les porter au trésor royal."

Cette matière semble prêter, pour les historiens de notre temps, à tant d'obscurités que, sur le seul nombre des généralités existant en 1789, les différences varient de 20 à 35. L'Assemblée constituante elle-même était si peu fixée sur ce point que l'on peut relever dans ses décisions les plus singulières divergences. Le 19 juin 1789, ayant à nommer les membres du Comité de vérification, elle répartit la totalité des députés entre 32 généralités. Le 11 juillet suivant, pour la formation du Comité des finances, elle se divise en 34 généralités; on a remarqué, en effet, que Auch et Pau auraient dû être divisées comme généralités et que Saint-Domingue a été omis. Pourquoi relever Auch et Pau plutôt que Toulouse et Montpellier qui n'avaient qu'un intendant? Comment trouver enfin à Saint-Domingue les éléments d'une généralité plutôt que dans les autres colonies? Le 7 septembre enfin, l'assemblée se répartit, à propos du Comité d'agriculture, en 35 généralités, la Corse étant ajoutée. La formation des départements vint heureusement arrêter ces extensions inexplicables.

Il serait impossible d'autre part de fixer une unité de subdivision des généralités; la preuve évidente s'en trouve dans les États de population dressés par généralités sur les ordres de Necker et conservés aux Archives nationales, particulièrement dans les cartons cotés D IVbis, 43-48. Les subdivisions utilisées pour ces États sont tantôt les élections, tantôt les justices royales (sénéchaussées ou bailliages), tantôt les subdélégations, tantôt les évêchés, recettes, etc., et cette diversité suffit à expliquer l'impossibilité que nous signalons.

L'affaire des limites des généralités ne présenterait pas les obscurités qui se rencontrent pour les gouvernements généraux; sur un grand nombre de points, il serait possible d'indiquer les confins d'une généralité, non pas sans doute les confins sur le terrain, comme nous l'entendons aujourd'hui, d'une commune ou d'un département, mais les confins par groupements de paroisses ou de communautés. Encore est-il qu'il y aurait lieu: 1° de rapporter ces limites à une date fixe; le pouvoir royal apportait des modifications fréquentes aux ressorts des généralités; l'étude des ressorts ainsi modifiés de 1760 à 1789 pour les généralités d'Auch, de Pau et Bayonne, d'Auch et Pau, de Bordeaux, présente les plus grandes difficultés; 2° de faire des réserves pour un grand nombre de paroisses dont la situation était indécise, soit qu'elles fussent mi-parties, soit qu'elles fussent contestées. Nous avons traité longuement toute cette affaire des généralités au chapitre VI de la deuxième partie de notre Recueil de documents (t. I, p. 442): nous y renvoyons pour les détails qui ne peuvent trouver place ici.