BOREL D'HAUTERIVE : Histoire des armoiries des Villes de France

Armoiries, armes, blason, écu: dessin réalisé avec Euralsuite.
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MARSEILLE

ARMES: d'argent, à une croix d'azur.

Ce serait s'engager dans un dédale inextricable que de rechercher sur les monnaies antiques de Marseille l'origine de ses armoiries. Leur type représente tour à tour des têtes d'homme, d'ours, de chien, de griffon, des lions, des taureaux cornupèles, des oliviers, des caducées, etc.
Les gouverneurs de Marseille, qu'on appelait vicomtes, et qui avaient pour armes: de gueules, au lion d'or, se rendirent souverains héréditaires vers la fin du dixième siècle.
Suivant la coutume du pays, leur succession se partageait entre leurs enfants; sans aucun égard au droit d'aînesse. La vicomté de Marseille se trouva ainsi divisée à plusieurs reprises en diverses portions, et la communauté de la ville en profita pour racheter son indépendance dans les premières années du treizième siècle.

Elle prit alors pour sceau une muraille baignée par les flots et ayant trois portes et trois tours, personnification de la ville. Le contre-scel représentait un saint Victor à cheval terrassant la Camargue, et portant un bouclier chargé d'une croix. C'est l'empreinte d'une bulle de plomb appendue au don de la vicomté de Marseille, fait par la ville au comte de Toulouse, en novembre 1330 (Dom Vaissète, tome III, page 352). Elle a été reproduite dans le Trésor de numismatique et de glyptique de MM. Lenormant et Chabouillet.
La croix qui figure dans ses armoiries est sans doute celle qui se trouvait sur le bouclier de saint Victor. Des traditions prétendent que ce meuble héraldique est une concession faite à la ville de Marseille au douzième siècle, en reconnaissance des services qu'elle avait rendus aux croisés.
Sous l'empire, on modifia ces armes, que l'on trouvait sans doute trop simples, et Marseille porta: tranché, au 1er d'argent, à la croix alaisée d'azur, qui est l'ancien blason de la ville; au 2e d'azur, à la demi-trirème antique d'or, mouvant de dextre et voguant sur une mer de sinople.
On ne lui donne pas ordinairement le chef de France, qu'elle avait droit de prendre comme bonne ville.
La devise de Marseille était autrefois: Victor deffend verrauoment Marseille et lous cioutadans.

Histoire

Suivant la légende, Marseille fut fondée par les Phocéens, dont le chef Euxène, choisi par Gytis, fille de Nann, roi des Ségobriges, put s'établir sur le rivage qui lui fut donné. Ces relations amicales avec les tribus celto-ligures ne durèrent pas, et la ville dut lutter contre elles à plusieurs reprises. Un nouvelle colonie phocéenne chassé par un général de Cyrus accrut sa prospérité. Gouvernée par un conseil de 600 citoyens avec 3 magistrats investis d'une autorité analogue à celle des consuls romains, elle créait, deux siècle après sa fondation des colonies à Nice, Antibes et la Ciotat, et elle envoyait Euthymène et Pythéas faire des voyages d'exploration. Mais elle avait de puissantes rivales dans Tyr et Carthage. Marseille eut de bons rapports avec Rome, elle l'aida contre les Gaulois et Annibal, et en fut secourue. La ruine de Carthage la favorisa ; mais, en se déclarant pour Pompée, elle exita la colère de César, qui la prit en 49 av. J.C. et réunit ses colonies à la république. Deux fois les Wisigoths la prirent, puis les Burgondes, la cédèrent aux Ostrogoths, remplacés par les Francs en 539. La ville basse appartint aux rois francs, tandis que la ville haute était aux évêques. En 735 les Sarrasins la pillèrent, mais il fut chaussés par Charles Martel. En 879, elle tomba au pouvoir de Boson, roi d'Arles. En 1214, la ville basse obtint son indépendance et fut gouvernée par un podestat assisté d'un conseil, tandis que la ville haute restait fief épiscopal. Charles d'Anjou, qui s'en empara en 1252, réprima avec violence une insurrection. En 1288, les deux villes furent réunies ; mais les guerres avaient ruiné le commerce et, en 1423, dans un nouveau siège, elle fut incendiée par Alphonse d'Aragon. Le roi René, pour lui rendre sa prospérité, institua des juges de commerce et réorganisa le conseil. Son petit-neveu légua la Provence à Louis XI, en 1481 ; mais la ville garda une certaine autonomie. Au XVIème siècle, assiégée deux fois par Charles-Quint en 1524 et 1538, livrée au fureur des guerres de religion, atteinte par la peste en 1580, reprise en 1596, après avoir traité avec l'Espagne en haine du roi de Navarre, Marseille voit décliner son commerce. Son industrie est atteinte ensuite par les prohibitions de Sully. Louis XIV, après une révolte, lui donne un viguier, assisté de deux échevins, et construit le fort Saint-Nicolas pour la réduire ; mais Colbert rétablit la franchise du port en 1669 et la relève. En 1720, la grande peste lui enlève 40 000 habitants sur 90 000.