Les Métiers et Corporations de la ville de Paris - Étienne Boileau

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Histoire générale de Paris - Les Métiers et Corporations de la ville de Paris
XIIIe siècle - Le Livre des Métiers d'Étienne Boileau - Introduction (extraits)

Classement des métiers et résumé des statuts des communautés ouvrières

GROUPES

Alimentation, Farines, Boissons, Épicerie et vivres en général

Orfèvrerie, Joaillerie, Sculpture

Métaux, Ouvriers en fer, Ouvriers en métaux divers, Objets divers de fantaisie, Armures

Étoffes et Habillements, Soie, Draps et Lainages, Toiles, Vêtements, Friperie

Cuirs et Peaux, Chaussures et Vêtements, Sellerie et Harnachement

Bâtiment et Métiers divers, Poteries, Étuviers et Chirurgiens

5ème GROUPE

CUIRS ET PEAUX

Les métiers qui font subir les premières préparations aux cuirs n'ont point présenté de statuts à Étienne Boileau; cependant, il est hors de doute qu'il existait un certain nombre d'industries de cet ordre. Dans le titre qui traite de l'impôt du hauban, on cite les Sueurs, les Baudroyers, les Boursiers, les Mégissiers, les Tanneurs qui découpent et ceux qui ne découpent pas, les Pelletiers, etc.
Les Sueurs, ouvriers en chaussure chargés spécialement, comme leur nom l'indique, de coudre les souliers, devaient faire partie de la communauté des Cordonniers.
Les Tanneurs, les Mégissiers, les Pelletiers, dépendaient peut-être d'un autre métier, à titre de préparateurs de cuirs.
Les Baudroyers s'intitulent, au premier article de leurs statuts: Corroyeurs de cuir pour faire courroies à serrer et semelles de souliers. Les Baudroyers-Corroyeurs fournissaient des cuirs tout préparés aux Corroyers, aux Lormiers et aux Merciers, métiers qui s'occupaient principalement de coudre les cuirs et de les orner de plaques de métal.

CHAUSSURES ET VÊTEMENTS

Les fabricants de chaussures de première qualité, employant de préférence le cordouan, cuir préparé à la façon de Cordoue, s'étaient désignés spécialement sous le nom de Cordouaniers; les Savetonniers et Savetiers, ouvriers de second ordre, ne mettaient en oeuvre que la basane. Toutefois les ouvriers en cuirs, tels que les Selliers, Savetiers, Bourreliers, obtenaient l'autorisation d'employer le cordouan, en achetant le métier de Cordouanier.
Les Savetonniers faisaient des souliers en basane, ou peau de veau.
Au-dessous des Cordouaniers et des Savetonniers venaient les Savetiers; ils occupaient, comme aujourd'hui, la dernière place.
Les Courroyers, qu'il ne faut pas prendre, d'après la ressemblance du nom, pour des corroyeurs, étaient des fabricants de courroies ou ceintures. On ornait ces courroies, comme tous les cuirs, de clous, de plaques de métal, de piqûres en soie ou en fil; elles servaient à rehausser les vêtements.
Les Gantiers ne pouvaient rien colporter; la vente ne devait se faire que chez eux et à leurs étaux des Halles.
Les ouvriers inscrits sous le nom de Boursiers fabriquaient divers objets en cuir, et, entre autres, des bourses et des braiers, ou caleçon en cuir de cerf; ils ont une certaine ressemblance avec les industriels contemporains que nous appelons culottiers.

SELLERIE ET HARNACHEMENT

Les métiers des Selliers, des Chapuiseurs et des Blasonniers, étaient francs, excepté en ce qui concerne l'emploi du cordouan.
Outre l'impôt dit «des huèses», ou bottines du Roi, lequel était réparti entre toutes les corporations d'ouvriers du cordouan, ils avaient encore une redevance s'élevant à quarante sous par an payable à la foire de Saint-Ladre, moyennant laquelle ils étaient dispensés de fermer leurs boutiques et de se rendre aux foires, pour y écouler leurs marchandises.
La fabrication des diverses parties du harnachement d'un cheval se partageait entre les métiers cités plus haut. Les Chapuiseurs, ou Arçonniers, faisaient la charpente de la selle. Les Blasonniers, plus simplement Cuireurs de selles, d'arçons et de blasons, ne paraissent avoir fabriqué autre chose que les garnitures de cuir, et en cela ils se confondent avec les Selliers. Peut-être faisaient-ils pour le compte de ceux-ci les premières préparations, telles que la garniture, le rembourrage, la couture, etc.
Quant aux Peintres-selliers, ils s'occupaient de la fabrication et de l'ornementation du harnais.
Les Selliers tenaient tellement à la qualité de la dorure, qu'ils mirent dans leurs statuts la défense de faire des marchés à forfait avec les doreurs, alléguant qu'à de telles conditions ceux-ci «ne forçaient pas assez les objets en or ou en argent, ce qui ne tournait ni au profit ni à l'honneur des Selliers».
Les statuts mentionnent encore les selles de bois verni, les selles blanches garnies de clous étamés, pour les gens de religion, les selles recouvertes de velours, avec des garnitures de clous dorés, de lacs de soie et autres broderies.
L'écusson était un des principaux ornements représentés sur les selles, d'où la dénomination des Blasonniers; il y en avait jusqu'à trois sur la même.
Les Lormiers n'étaient qu'une spécialité de Selliers, pour la fabrication des rênes, guides et courroies de toute espèce. Leur travail se rapprochait beaucoup de celui des Courroyers; ils coupaient et cousaient leurs bandes de cuir et les ornaient de plaques de métal, comme on le faisait pour les ceintures des hommes.
Les Bourreliers faisaient, comme aujourd'hui, la harnacherie commune pour les chevaux de trait. Les colliers devaient être rembourrés ou de poil ou d'étoupe, mais sans mélange; le cuir de basane et de mouton était prohibé, de même que l'emploi des clous étamés.

6éme GROUPE

BÂTIMENT ET MÉTIERS DIVERS

Sous le titre unique de Charpentiers sont réunis les ouvriers qui, selon le texte, «oeuvrent du trenchant en merrien», c'est-à-dire qui travaillent le bois avec des outils. Leurs catégories sont nombreuses; on en compte dix: les Charpentiers-grossiers, les Huchiers, faiseurs de huches ou coffres, les Huissiers, faiseurs de huis ou portes, les Tonneliers, Charrons, Charretiers, Couvreurs de maisons, les Cochetiers, faiseurs de bateaux, les Tourneurs et Lambrisseurs.
Avec les Maçons sont rangés les Tailleurs de pierre, Mortelliers et Plâtriers. On a supposé que les Mortelliers étaient chargés de la confection des ciments et mortiers à bâtir.

POTERIES

Les Potiers d'étain se confondaient avec les autres ouvriers d'étain et de métaux. Les magnans, ou chaudronniers ambulants, qui allaient refondre l'étain dans les maisons, étaient soumis à la surveillance des Jurés du métier.
Les statuts des Écuelliers sont très brefs; ils se bornent à exposer les objets en commerce. «Les Écuelliers, dit l'article 1er, sont des vendeurs d'écuelles, de hanap de bois et de madre, d'auges, fourches, pelles, bêches, pieux, etc.» Ces ouvriers répondaient à peu près à nos tourneurs sur bois.
Escuelles, bols ou assiettes, dont la forme variait à l'infini. Quelques-unes avaient des oreilles ou des anses. Auges: on appelait ainsi des baignoires, des meubles et même des cercueils. Hanap: était un vase à boire, dont la forme et la matière variaient à l'infini. Madre: pierre fine veinée, comme l'agathe onyx, ou bois veiné, comme l'érable et plusieurs racines d'autres arbres. Madre est aussi synonyme de vase à boire.
Le métier de Potiers de terre se composait apparemment de Potiers fabricants et de revendeurs de poteries. On interdisait de recuire ou «d'embouser» les pots. L'embousement était une espèce de vernis à froid, composé de blanc d'oeuf et de chaux.

ÉTUVEURS ET CHIRURGIENS

Les établissements de bains, créés à Paris sous le nom d'étuves, semblent avoir été imités de l'Orient, où les bains de vapeur ont été fort à la mode.
Les Étuveurs formaient une véritable communauté. On distinguait les étuves, ou bains de vapeur, des bains d'eau tiède. Un détail des moeurs: il était défendu de faire «crier» ses étuves avant le jour, parce que les personnes qui se rendaient à ce cri étaient exposées à de nombreux dangers. Il était donc d'usage d'aller se baigner de grand matin, en sortant du lit.
Les Chirurgiens, bien que leur profession soit essentiellement libérale, constituaient cependant une corporation formée sur le modèle des autres métiers.